La panne informatique qui touche la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) n’était toujours pas réglée mercredi. Les centres de services doivent donc rester fermés, sauf pour la tenue des examens pratiques de conduite. Une situation qualifiée d’« inacceptable » par Québec, qui pointe du doigt Microsoft.
Selon la SAAQ, la panne est liée à un parc de serveurs soutenant plusieurs services de soutien et de mission. Les problèmes ont commencé à 15 h mardi et se sont poursuivis toute la journée mercredi. Cette défaillance du système informatique a contraint la SAAQ à ne pas ouvrir ses centres de services et ses mandataires. La plateforme SAAQclic, bien que « fonctionnelle », était inaccessible au moment où ces lignes étaient écrites.
Les examens pratiques pouvaient tout de même avoir lieu, mais les personnes qui avaient un rendez-vous d’un autre type devaient être « contactées pour se voir offrir un nouveau rendez-vous dans les jours à venir ».
La SAAQ a assuré que ses équipes travaillaient avec celles de Microsoft pour résoudre ces problèmes « dans les meilleurs délais ». Elle a précisé que les données de ses clients n’avaient pas été touchées.
« Totalement inacceptable »
Accosté dans les couloirs de l’Assemblée nationale, le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Gilles Bélanger, a qualifié la situation de « totalement inacceptable ». « Mais ce n’est pas SAAQclic, c’est Microsoft », a-t-il souligné.
« Et ce n’est pas la première fois [qu’un tel problème survient] », a avoué M. Bélanger, qui est entré au Conseil des ministres il y a à peine deux mois. Tout de même, se débarrasser de Microsoft, « ça ne se fait pas du jour au lendemain », selon lui. D’autant plus que des ententes contractuelles lient actuellement le gouvernement à l’entreprise américaine, a-t-il renchéri.
À la période des questions, le ministre a nommé sa volonté d’affranchir le Québec des géants américains du Web. « Notre gouvernement travaille sur une approche de souveraineté numérique pour trouver des alternatives de façon à ne plus jamais avoir de bris de service comme [l’actuelle panne informatique à la SAAQ]. »
Si cette panne a démontré une chose, c’est bien la dépendance du Québec à un « fournisseur externe », a expliqué au Devoir le spécialiste en cybersécurité Steve Waterhouse. La solution ? Miser sur la souveraineté numérique, a-t-il assuré. La proposition du ministre Bélanger serait « réaliste », selon l’expert, qui a quand même fait valoir la nécessité d’un plan concret et à long terme « sur les 10 prochaines années ».
La première étape devrait prendre la forme d’un état des lieux, destiné notamment à évaluer le pourcentage des données stockées en sol américain et canadien, selon M. Waterhouse, qui connaît bien le dossier puisqu’il a été sous-ministre adjoint au ministère de la Cybersécurité et du Numérique de 2022 à 2023.
Ensuite, pour améliorer la sécurité des données, il faudrait les chiffrer et générer « nos propres clés » avant de les placer dans le service infonuagique étranger, a expliqué M. Waterhouse. Ces « clés » d’accès rendraient l’information plus difficile à obtenir et mieux protégée. Il s’agit d’une sorte de compromis vers la souveraineté numérique qui permettrait tout de même un maintien du recours à des fournisseurs américains.
Autre proposition : envisager l’hébergement local, a-t-il suggéré. Ce serait toutefois un processus complexe puisqu’on ne peut pas exclure délibérément les géants américains d’éventuels appels d’offres.
L’opposition déplore un « fiasco »
En matinée, le chef intérimaire de l’opposition libérale, Marc Tanguay, avait qualifié la gestion de la panne chez SAAQclic de « fiasco ». « À quelle heure la ministre [des Transports, Geneviève Guilbault] devient-elle responsable ? » a-t-il souligné en point de presse mercredi matin.
« Les Québécois ont surpayé des centaines de millions pour un projet qui, vraisemblablement, ne fonctionne pas, et on ne sait toujours pas qui est responsable du fiasco », a clamé le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard.
« C’est très embarrassant pour le gouvernement », a soutenu l’élu péquiste Pascal Paradis, en point de presse. Il a déploré « l’impact réel » de cette panne sur beaucoup de citoyens. Il a rappelé que le Parti québécois avait demandé une enquête sur l’ensemble des contrats informatiques du gouvernement, qui avait toutefois refusé.
Avec La Presse canadienne